A l’occasion de la sortie de son nouveau titre « Dany« , avec Grrre Games et BlackRock Games, le prolifique auteur Phil Vizcarro nous donne quelques nouvelles sur ce qui l’attend en 2019 ! Le nantais révèle notamment des infos exclusives sur la suite de Cosmo Duck et ce qu’il pense de certaines productions du monde des jeux de société… non sans humour, mais à coup sûr, sans langue de bois.
L’interview de Phil Vizcarro
Jeux.com : Bonjour Phil, ravi d’avoir de tes nouvelles depuis la campagne Hollywood Death Race, le jeu a beaucoup plu à la communauté Jeux.com, par sa nostalgie des années 80-90 et sa mécanique bien huilée ! A quelle étape en sommes-nous à présent sur ce jeu ? On a vu passer la boite de Legacy Championship qui contient de nouveaux personnages…
Phil Vizcarro : Bonjour, ravi d’être de retour parmi vous ! Alors, HDR est sur le point d’entrer en prod. Nous venons de finir les règles de la boîte de base, celles de l’extension Legacy et surtout l’Almanach, qui va être vraiment très fun. Nous sommes dans les temps, donc pour le moment la date annoncée de juin pour la livraison et la sortie boutique est toujours une réalité. J’ai hâte d’avoir une boîte complète entre les mains, t’imagines même pas !
J : On te comprend… Dis-nous en plus sur l’Almanach s’il te plait, tu nous fais saliver !
PV : Alors en fait, c’est un bouquin qui reprend tous les résultats sportifs de ces… heu non. Notre Almanach va en fait proposer tout un tas de choses. On y trouvera les profils complets de tous les pilotes de toutes les versions du jeu (KSE et extensions compris), quelques astuces pour bien défoncer ses potes, un journal du développement du jeu, d’autres petites surprises mais aussi et surtout une série de défis à cocher ! Un peu comme les trophées sur PS4, tu auras des sortes d’objectifs à accomplir pour devenir un vrai boss de HDR. Certains pourront être réalisés avec n’importe quel véhicule, tandis que d’autres seront propres à un personnage spécifique et liés à sa ou son rival(e). De quoi ajouter de nombreuses heures de jeu au compteur ! (rires)
J : Tu sors, en compagnie de Grrre Games et BlackRock Games, un jeu d’ambiance plutôt unique en son genre : Dany. Les joueurs vont incarner des personnalités de Dany dans une expérience inédite : du bluff, de la déduction, on te laisse nous en dire plus ?
PV : Avec Dany, j’avais envie d’explorer le thème des multiples personnalités d’un angle qui n’avait pas encore été exploité : celui de se mettre à la place d’une de ses personnalités. Donc dans le jeu, tout le monde va incarner une personnalité secondaire dans la tête de Dany. Tout le monde sauf un joueur ou une joueuse, qui incarnera Dany. Personne ne sait qui est qui, vous ne connaissez que votre propre personnalité. Le but pour les personnalités secondaires est de parvenir à communiquer entre elles 6 fois, et le but pour Dany est de contribuer à ce qu’elles échouent 3 fois sans pour autant être démasqué(e).
Et le jeu s’appuie sur les superbes illustrations d’Antoine Baillargeau – dit BENGAL, sans qui Dany ne serait pas Dany.
J : Bengal, lui aussi basé à Nantes. Comment en êtes-vous venus à travailler ensemble ? Tu le connaissais avant ce projet ?
PV : C’est un amour de vacances, une histoire sans lendemain, mais à laquelle on repense… mais qu’est-ce que je raconte ?! Non, en fait on a fait connaissance lorsqu’il a répondu à une annonce que j’ai passée, début 2018, concernant une recherche d’illustrateur pour un autre proto. J’ai reçu tout un tas de réponses, dont la sienne. Alors si son style ne correspondait PAS DU TOUT à ce que je cherchais pour le jeu en question, il m’a carrément soufflé ! J’ai compris tout de suite qu’il fallait qu’on bosse ensemble sur un jeu, je n’avais juste pas encore l’idée du jeu. Je lui ai donc proposé qu’on reste en contact, le temps que je trouve l’idée qui allait parfaitement coller à son univers graphique.
Et un matin, ça a fait « ding » dans ma tête. L’idée de Dany était là. Je l’ai appelé, je lui ai soumis l’idée et il a tout de suite adhéré. On a commencé immédiatement à bosser ensemble dessus. Mais pas main dans la main, parce que c’est gênant pour dessiner…
Testez Dany sur le FIJ de Cannes
J : Le Festival International du Jeu (FIJ) de Cannes approche à grands pas (du 22 au 24 février), tu seras présent avec quelques prototypes ?
Alors j’y serai, déjà parce que je serai sur le stand de Grrre Games pour présenter Dany et faire quelques dédicaces. Mais oui, j’emporte quelques protos pour les faire tester à différents éditeurs. J’ai quelques titres que j’aimerais bien signer cette année.
J : On peut savoir lesquels ?
Globalement, j’aimerais signer Life, qui a pour moi un vrai gros potentiel, Streets of Dice, Up to Eleven, Totems (qui devra sûrement changer de nom)… et d’autres trucs propres, éditables mais dont je n’ai pas encore vraiment parlé publiquement.
J : Rien qu’à voir tous tes protos sur le site, ça fait envie. On te laisse nous dire quelques mots sur ceux-là ?
Hm. Je peux te parler de ceux que j’aimerais faire éditer en priorité, oui. Life est un jeu dans lequel un arbre millénaire offre des graines aux humains, mais meurt petit à petit. La façon dont les joueurs vont utiliser ces graines pour créer des créatures fantastiques ou les détruire va influer sur l’état de l’Arbre, qui représente en fait la Nature. Si les joueurs jouent tous pour la gagne, égoïstement, alors tout le monde va perdre, car l’Arbre va mourir. Bien qu’il s’agisse d’un jeu compétitif, une certaine forme de coopération est obligatoire, les joueurs étant les seuls capables de redonner un peu de vie à l’Arbre. Et ce qui est vraiment chouette, c’est que le message semble passer, même inconsciemment, quand les gens y jouent.
Ensuite, tu as Streets of Dice. Bon, là, si tu as déjà joué à Double Dragon, Final Fight ou Rushing Beat Shura, t’es complètement dans le thème. C’est un beat-them-up à scénario, avec des embranchements scénaristiques qui font que tu peux refaire le jeu plusieurs fois sans jamais reprendre exactement le même chemin, des persos cachés que tu débloques, plein de modes de jeu, et surtout jouable en solo ou en full co-op contre le jeu. Les combats sont nerveux et les multiples persos jouables ont tous un style et des attaques différentes. J’y joue souvent avec des potes, il plait beaucoup.
Et puis je sais que tu as craqué sur Up To Eleven, mon jeu qui te permet d’incarner certains des plus grands artistes et groupes de tous les temps… et Daft Punk. (rires) C’est un deckbuilding dans lequel des groupes de différents styles et époques s’affrontent dans un énorme concert. Tu récupères des cartes pour activer des attaques spéciales, gagner ou voler des fans et tu peux utiliser des super attaques que te confèrent les chansons de ton répertoire ou les membres de ton groupe. Les parties sont un peu plus longues que ce que j’avais estimé au départ, mais il tourne bien, et il est plein de rebondissements.
J : Cette année, les nominés pour l’As d’or du FIJ sont L’ile au Trésor, Shadows Amsterdam, Solenia et The Mind, tu as pu y jouer ? A ton avis, lequel a ses chances et pourquoi ?
Côté As d’or des jeux « expert », Detective, Keyforge et Spirit Island : mêmes questions !
J’ai joué à The Mind et Shadows Asterdam (que j’aime beaucoup). Par contre, comme c’est une compétition et que c’est par définition totalement subjectif, je n’ai aucune idée de qui pourra l’emporter, et je n’aurai probablement pas fait la même sélection si j’avais eu à le faire. Je te dis, c’est totalement subjectif. Tout ce que je sais, c’est que ça va couiner sur Internet après l’annonce des résultats.
J’avoue être assez étranger à toutes ces remises de prix, comme l’As d’Or, le Spiel ou les TT D’or. Je n’ai rien de mal à en dire, hein, mais comme je ne les suis que de très loin, je ne pourrai pas en parler sans dire n’importe quoi.
Les projets de Phil et Cosmo Duck
J : On te souhaite de profiter et de faire un super salon. Du coup, qu’as-tu prévu après Cannes ?
Faire le tri dans mes protos, mettre au placard ce qui ne me satisfait pas, fignoler le reste, et en faire éditer, ça serait déjà sympa. Et continuer mes autres projets en dehors du JDS.
J : Ça parle de jeu tes autres projets ?
Pas vraiment. C’est justement pour me sortir un peu la tête du jeu. Je viens de me mettre à dessiner par exemple. Bon alors y’a du boulot, mais je m’éclate, et puis c’est plus thérapeutique qu’autre chose.
En fait, j’aimerais traiter de sujets graves avec le jeu de société, de choses vraiment pas rigolotes, mais je crois (et je peux me tromper) que le milieu n’est pas encore complètement prêt pour ça. Donc pour le moment je le fais avec des crayons et un cahier à dessins.
Sinon je bosse avec une association qui s’appelle e-Nable. On développe et imprime des prothèses pour des enfants (et maintenant aussi des adultes) atteints d’agénésie (nés sans main ou sans bras) ou qui les ont perdus suite à un accident. Ce sont des mains articulées mécaniquement qu’on leur offre. Ça ne coûte rien aux familles. C’est super élaboré, tu peux tenir un verre ou même dessiner avec !
C’est chouette de faire partie de ça. Je regrette juste que ça ne soit pas plus connu et plus répandu. Il suffit d’avoir une imprimante 3D et un peu de temps. Je me dis que n’importe qui pourrait y contribuer, quoi. Et puis je ne sais pas, offrir un bras à un enfant ça me semble avoir plus de sens que d’imprimer douze bustes de Hulk pour décorer ses toilettes. Après, si t’aimes vraiment Hulk… Qui suis-je pour juger, hein ?
J : Difficile de dire le contraire, même si on en connait ! En tout cas, bravo pour ton implication dans cette asso.
Sur ton site Cosmoduck.com, on aperçoit des prototypes plutôt avancés, souvent basés sur la culture jeux vidéo des jeux années 80-90 (Flick out, Paper Kid, Streets of Dice dont nous avions parlé dans notre précédente interview) et un proto qui nous a particulièrement fait envie : Up to Eleven, où les joueurs vont devoir amener leur groupe jusqu’à la gloire, à fond les amplis ! Certains vont-ils voir le jour ? Bien qu’ils le méritent tous…
Si ça ne tenait qu’à moi, la plupart seraient déjà en voie d’édition ! (rires) Mais j’ai décidé de lever le pied sur la créa cette année, et de me concentrer sur ce qui était fait, prêt, et n’attendait plus qu’à être signé. Des jeux comme Up To Eleven, Streets of Dice, Paper Kid, Life ou Les Fondateurs de l’Univers sont prêts. Mais je n’ai pas encore vraiment pris le temps de les présenter à des éditeurs. En 2018, je me suis concentré sur la créa. Pour 2019, je vais plutôt chercher à faire éditer tout ce qui est éditable.
J : On va entendre encore plus parler de Cosmo Duck alors ?
Cosmo Duck devient un collectif. J’ai un ami qui va rejoindre l’aventure là, courant février. On bosse déjà sur un jeu ensemble, qui va être très chouette, avec du gameplay encore jamais vu, mais dont je ne dis rien pour le moment.
Après, je suis en discussion avec un auteur Algérien aussi, Il a des idées super, qu’on n’a pas déjà vu trente-six fois, et une vraie bonne mentalité. Très humble. On a prévu de développer des trucs ensemble cette année, et il pourrait bien lui aussi intégrer Cosmo Duck. On s’internationalise ! (rires)
J : C’est excellent ça ! Dernière question : d’après toi, comment va se dérouler 2019 pour le secteur du jeu de société ?
Oula ! Je ne suis pas analyste ! (rires) Mais on devrait voir 3 ou 4 nouvelles copies de Cards Against Humanity, ça, ça marche toujours pour prendre du blé facilement. T’as même pas besoin de t’y connaître un peu. Et Kickstarter devrait avoir son lot de jeux dont la qualité sera jugée sur la quantité de figurines, ça aussi ça marche bien…
J’espère par contre qu’on n’entendra plus d’histoires comme celle de Nostromo, et des charlots qui ont volé son concept à un auteur. Les commerciaux qui pensent faire fortune dans le JDS, c’est un cancer.
J : Je crois qu’on est arrivés au bout des clones de Cards against humanity, non ? (ex : Blanc Manger Coco, Limite Limite…). Et puis, on parlait de jeux de société là, si on peut mettre les jeux d’apéro de côté, ah ah… Blague à part, y-a-t-il un jeu qui t’a bluffé en 2018, par sa créativité, son univers, son ambiance (en dehors des tiens bien sûr) ?
Aaaah mais moi j’en fais des jeux d’apéro, et comme dirait Didier Super, y’en a des biens ! C’est juste que quand je vois certains noms associés à certains projets, ça me fait grincer des dents. Mais les mecs sont bankables sur leur nom, ils auraient tort de se priver. Je ne sais pas si on peut vraiment s’interroger sur leur légitimité…. au-delà de l’affect, j’entends. On parle de jeux de société, pas de neurochirurgie.
Un jeu de 2018 qui m’aurait bluffé… Y’en a. Faut juste que ça me revienne… Ah oui ! Root ! Magnifique, à tout point de vue. Peanut Club m’a bien fait marrer, L’Expédition Perdue, Big Trouble in Little China… Le problème c’est que je n’ai pas eu le temps de jouer à la plupart de ceux que j’ai acheté. Genre Dinosaur Island, Fireball Island ou Monster Slaughter… Donc je ne sais pas s’ils vont me bluffer, mais j’aimerais bien. Je devrais dégager plus de temps cette année pour jouer à tout ça et faire le tri dans ma collection.
Quant à mes jeux, l’avenir nous dira s’ils méritent leur place en rayon… et dans les étagères (suédoises) des joueuses et joueurs !
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